Ordonnance de protection : Une jurisprudence clarifiée pour la sécurité des victimes et de leurs enfants
Violences conjugales & ordonnance de protection : Lorsque le juge aux affaires familiales estime qu’il existe des raisons sérieuses de considérer comme vraisemblables la commission des faits de violence allégués et le danger auquel est exposée la victime et que celle-ci est parent d’un ou plusieurs enfants, il peut, pour assurer sa protection, interdire à la partie défenderesse de recevoir ou de rencontrer le ou les enfants, ainsi que d’entrer en relation avec eux.
(Cass civ 1re 23 mai 2024 n°22-22.600)
Une femme avait déposé plainte pour violences conjugales contre son conjoint et par la suite, avait sollicité une ordonnance de protection.
Le juge ayant retenu que les violences étaient vraisemblables et que le danger était actuel pour la demanderesse, une ordonnance de protection avait été délivrée à son bénéfice le 31 mars 2022. L’Ordonnance de protection faisait notamment interdiction au père :
- De recevoir ou de rencontrer l’enfant hors des droits de visite éventuellement conservés ;
- Entrer en relation avec lui de quelque façon que ce soit ;
- Se rendre au lieu de résidence de la mère et de l’enfant.
L’ordonnance était confirmée en appel.
Le père avait par la suite formé un pourvoi en cassation, se prévalent de l’absence de preuve de l’existence du danger pour l’enfant. Il soutenait que le danger de l’enfant ne peut se déduire du seul fait que sa mère est exposée à des violences vraisemblables et à un danger.
L’affaire posait donc la question de savoir si, lorsque les conditions tenant à la vraisemblance des violences et du danger étaient considérées comme satisfaites pour la bénéficiaire de l’ordonnance de la protection, si la condition de danger devait être appréciée spécifiquement pour l’enfant pour justifier des mesures restrictives vis-à-vis de l’autre parent.
*
Par cet arrêt du 23 mai 2024, la cour de cassation a tranché que le juge qui délivre une ordonnance de protection pouvait, pour assurer la protection du parent, et sans avoir à se prononcer sur l’existence d’un danger pour l’enfant, interdire au père auteur de violences de rencontrer l’enfant.
*
La Cour de cassation rejette donc le pourvoi du père et étaye, sur le fondement des articles 515-9 et 515-11 du Code civil, le rôle du juge aux affaires familiales en matière d’ordonnance de protection.
Le code civil n’exige qu’une vraisemblance, laquelle est soumise à l’appréciation souveraine du juge. Il suffit donc que les violences soient vraisemblables à l’égard de la mère. Ainsi, il pouvait interdire au père d’entrer en contact avec la mère et l’enfant sans se prononcer spécifiquement sur l’existence d’un danger encouru par ce dernier.
Camille VINCENT
Avocat Collaborateur – Droit de la famille