Cour de cassation, 1ère Chambre civile, 15 mars 2023, n°21-12.033 :
« Lorsqu’un pourvoi a été formé contre l’arrêt d’appel prononçant le divorce et condamnant le conjoint au versement d’une prestation compensatoire, le décès de ce dernier avant que la Cour de cassation ne statue éteint l’action en divorce. »
Deux époux s’étaient engagés dans une procédure de divorce. Par un arrêt en date du 9 mars 2021, la Cour d’appel de COLMAR avait prononcé le divorce et condamné l’époux au versement d’une prestation compensatoire.
À la suite de cet arrêt, l’épouse décide de former un pourvoi en Cassation. Mais avant même que la Cour de cassation ne soit saisie de l’affaire, l’époux décède le 4 juin 2022.
La Haute juridiction, dans cet arrêt du 15 mars 2023, fait une application stricte de la règle de droit au visa des articles 227 et 260 du Code civil rappelant ainsi que « le mariage se dissout par la mort de l’un des époux. Par suite l’action en divorce s’éteint par le décès de l’un deux, survenu avant que la décision prononçant le divorce ait acquis force de chose jugée. ».
La justification est simple et logique, la Cour de cassation soulignant que le décès est justifié par l’acte d’état civil.
En prononçant le non-lieu à statuer, la Haute juridiction confirme une solution bien établie et déjà récemment rappelée (Cass.1ère civ. 15 septembre 2021, n°20-19.593).
S’il ne ressort à première vue aucune nouveauté de cette jurisprudence, cette solution entraine des conséquences successorales qu’il est important de souligner.
En effet, l’action en divorce se trouvant éteinte par le décès prématuré de l’époux, l’épouse sera appelée à la succession de son défunt mari et aura vocation à percevoir a minima ses droits légaux [article 757 du Code civil], à jouir de ses droits temporaires [article 763 du Code civil] et viager d’usage et d’habitation [article 764 du Code civil]. Rappelons sur ce point que les droits légaux et supplétifs ont largement été révisés à la hausse au début des années 2000 par la Loi 2001-1135 modifiée par la Loi 2006-728 du 23 juin 2006.
Prudence donc notamment dans les procédures de divorces telles qu’en l’espèce qui s’annoncent longues et conflictuelles !
Il peut paraître opportun de conseiller aux époux de priver leur conjoint survivant de ses droits successoraux en respecter le formalisme dédié à cet effet. Cette privation globale doit s’effectuer par recours au testament authentique, bien qu’il soit possible de priver le conjoint survivant seulement de ses droits légaux [exclusion faite du droit d’usage et d’habitation] par simple testament olographe.
Cette privation peut être réalisée sous réserve du maintien exigé du droit temporaire au logement, d’une durée d’un an d’ordre public conformément aux conséquences du mariage [article 763 du Code civil].
Enfin, il faudra veiller à révoquer les libéralités entre époux si ces dernières ne prévoient pas de clause de révocation automatique en cas d’ouverture d’une instance en divorce.
Une décision qui apparaît au premier regard comme un simple rappel des textes légaux, mais qui mérite une attention toute particulière quant à ses conséquences d’un point de vue successoral et souligne à nouveau l’enjeux de la sécurité juridique.
Agathe DIOT-DUDREUILH
Avocat à la Cour
Collaboratrice - Pôle Droit des Personnes, de la Famille et de leur Patrimoine