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Sarah ALONSO

Licenciement discriminatoire : la Cour de cassation renforce les droits des salariées enceintes et précise l’indemnisation en cas de nullité.



magasin lidl

Dans un arrêt du 6 novembre 2024, n°23-13.706, rendu par la Cour de cassation, une salariée engagée en CDD par la Société Lidl est licenciée pour faute grave alors qu’elle se trouve en état de grossesse.


Cette dernière va saisir le Conseil de prud’hommes pour contester son licenciement pour faute grave et solliciter la nullité de son licenciement.


Dans sa requête aux fins de saisine du Conseil de prud’hommes, la salariée a sollicité des dommages et intérêts et le paiement des salaires dus pendant la période de protection couverte par la nullité.


Il convient de noter que cette dernière n’a pas sollicité sa réintégration au sein de la Société Lidl.  


Ses demandes ont été accueillies jusqu’en appel.

La Société Lidl a formé un pourvoi en cassation estimant que la salariée n’aurait pas dû bénéficier de ses rappels de salaire pendant la période de protection.

En principe, l’article L.1235-3-1 du Code du travail énonce que lorsque le juge déclare le licenciement nul et que la salariée ne sollicite pas sa réintégration au sein de la Société, elle ne peut valablement obtenir le paiement des salaires qu’elle aurait dû percevoir sur la période couverte par la nullité. Elle peut uniquement obtenir une indemnité d’au moins six mois de salaire.


Cet arrêt apporte une nouvelle solution en s’appuyant sur le droit européen.


La Cour de cassation affirme que « Il résulte de la combinaison de ces dispositions, interprétée à la lumière des articles 10 de la directive 92/85/CEE et 18 de la directive 2006/54/CE précités, que la salariée, qui n'est pas tenue de demander sa réintégration, a droit, outre les indemnités de rupture et une indemnité au moins égale à six mois de salaire réparant intégralement le préjudice subi résultant du caractère illicite du licenciement, aux salaires qu'elle aurait perçus pendant la période couverte par la nullité. ».


La Cour de cassation se base sur un arrêt constant de la CJCE qui énonce qu’un licenciement intervenu au cours d’un congé maternité ou durant une grossesse « ne peut concerner que les femmes et constitue, dès lors, une discrimination directe fondée sur le sexe ».

La Haute Juridiction réaffirme donc une ancienne jurisprudence de la Cour de Justice de l’Union Européenne selon laquelle si la situation d’égalité ne peut être rétablie faute de réintégration, alors elle doit l’être par une réparation pécuniaire qui doit compenser intégralement les préjudices subis (CJCE, arrêt du 2 août 1993, Marshall, C-271/91, point 25 ; 17 décembre 2015, Arjona Camacho, C-407/14, points 32 et 33).


Ainsi, la Cour de cassation sanctionne lourdement le licenciement intervenu au cours d’un congé maternité qu’elle considère comme discriminatoire et nul et autorise le rappel de salaire sur la période couverte par la nullité et ceci même en l’absence de demande de réintégration de la salariée.


Il faut néanmoins nuancer la portée de cet arrêt. En effet, cette solution ne concerne que les cas de licenciements nuls ne donnant pas lieu à l’application des barèmes Macron.

Ainsi, la difficulté pour le salarié est de démontrer que son licenciement s’appuie bien sur l’un des motifs prohibés de l’article L.1235-3-1 du Code du travail, justifiant sa nullité.

(Cass. soc., 6 nov. 2024 n°23-14.706)


Sarah ALONSO

Avocat Collaborateur

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