Prenant en compte les dernières affaires d’occupations illégales de domiciles dont certaines ont défrayé la chronique ainsi que le droit de propriété, droit fondamental, inviolable, sacré et inaliénable consacré par l’article 17 de la Déclaration des Droits de l’homme et du citoyen, la nouvelle loi n°2023-668 du 27 juillet 2023 promulguée le 28 juillet 2023 et entrée en vigueur le 29 juillet 2023, dite « anti-squat» ou « Loi Kasbarian », contient des dispositions de nature à combattre l’occupation illicite des logements et à réduire certains délais de procédure en matière locative.
Elle sanctionne également par de lourdes peines pénales les squatteurs et les locataires qui ne quittent pas le logement alors qu’une décision de justice ordonnant leur expulsion a été prononcée à leur encontre.
Cette nouvelle loi tend à apporter une meilleure protection du propriétaire d’un bien immobilier quel qu’il soit (domicile, local d’habitation, etc…) et que ce soit à l’encontre d’un squatteur ou d’un locataire défaillant.
L’idée de M. Guillaume KASBARIAN, rapporteur de la loi visant à protéger les logements contre l’occupation illicite, est de « renforcer les sanctions contre le squat, contre l’incitation au squat et contre les marchands de sommeil. Grâce à ce texte, nous protégerons les victimes des squatteurs ».
# Selon le type de personne défini par la loi « Kasbarian », une procédure spécifique sera appliquée :
« squatteur » : personne qui s’introduit dans un local « à l’aide de manœuvres, de menaces, de voies de fait ou de contraintes », correspondant à l’ancien statut de l’occupant sans droit ni titre.
« locataire défaillant » : personne qui méconnaît les obligations contractuelles au titre du bail signé avec le propriétaire et notamment la 1ère obligation locative, celle d’avoir à payer son loyer.
La loi Anti Squat : une procédure accélérée lors de la découverte de l’occupation illicite
d’un domicile ou d’un logement contre un « squatteur »
L’article 38 de la loi n° 2007-290 du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable dite « Loi DALO », prévoyait déjà une procédure d’expulsion accélérée par décision administrative.
En effet, en cas d’introduction et de maintien dans le domicile d’autrui à l’aide de manœuvres, menaces, voies de fait ou de contrainte, le propriétaire ou le locataire du logement occupé avait la possibilité de demander directement au Préfet de mettre en demeure l’occupant de quitter les lieux, après avoir accompli les formalités suivantes :
* dépôt de plainte ;
* preuve que le logement constitue son domicile ;
* constat de l’occupation illicite par un officier de police judiciaire.
La mise en demeure préfectorale était assortie d’un délai d’exécution qui ne pouvait être inférieur à 24 heures, et était notifiée aux occupants et publiée sous forme d’affichage en mairie et sur les lieux, voire notifiée au propriétaire ou au locataire.
Le dispositif prévoyait qu’en cas de mise en demeure infructueuse dans le délai fixé, l’autorité préfectorale devait procéder à l’évacuation forcée du logement, sauf opposition du propriétaire ou du locataire, dans le délai fixé pour l’exécution de la mise en demeure.
L’article 6 II de la loi du 23 juillet 2023 a substantiellement modifié l’article 38 de la loi n° 2007-290 du 5 mars 2007 le rendant applicable aux cas de maintien illicite dans le logement, sans qu’il soit nécessaire que l’introduction dans le logement ait été effectuée illicitement, et aux logements non meublés et élargissant la liste des personnes pouvant constater l’occupation illicite du logement aux maires et aux commissaires de justice, le droit antérieur ne mentionnant que les officiers de police judiciaire.
Également, le nouveau second alinéa de l’article 38 rénové crée une obligation pour le Préfet d’adresser dans un délai de 72 heures une demande à l’administration fiscale pour établir la preuve des droits de la personne lésée par le squat, lorsque celle-ci ne peut en apporter la preuve par elle-même.
# Toujours dans l’optique d’assurer la compatibilité de la procédure de l’article 38 de la loi DALO avec la jurisprudence constitutionnelle, l’Assemblée nationale a également introduit une distinction quant aux délais d’exécution de l’évacuation forcée.
En effet, si ceux-ci restent de 24 heures pour le squat des logements constituant le domicile du requérant, ils sont portés à 7 jours lorsque le local occupé illicitement est un local à usage d’habitation ne constituant pas le domicile du requérant.
Enfin, les articles 8 et 10 de la loi du 27 juillet 2023 sont venus modifier l’article L. 412-1 du code des procédures civiles d’exécution qui stipulait que « l’expulsion ne peut avoir lieu qu’à l’expiration d’un délai de 2 mois qui suit le commandement » (dans le cas d’une saisine d’une juridiction judiciaire).
Aujourd’hui, ce délai de deux mois n’est pas applicable lorsque le juge constate la mauvaise foi de la personne expulsée ou que les personnes dont l’expulsion est ordonnée sont entrées dans les locaux à l’aide de manœuvres, de menaces, de voies de faits ou de contrainte.
La loi Anti squat : création de deux nouveaux délits dans le Code pénal
et aggravation des peines pour des délits déjà prévus dans le Code Pénal
La loi « Kasbarian » ne se cantonne pas à encadrer les occupations frauduleuses, sans droit ni titre, puisqu’elle introduit deux nouveaux délits dans le Code Pénal au Chapitre V :
Le premier délit défini à l’article 315-1 du Code pénal (reprenant l’ancien article 226-4) est celui du « squat » sanctionnant le « fait pour une personne de s’introduire dans un local à usage d’habitation ou à usage de commercial, agricole ou professionnel à l'aide de manœuvres, de menaces, de voies de fait ou de contrainte ».
Ce nouveau délit pénal permet d’étendre le champ d’application de l’occupation frauduleuse aux bureaux, commerces, entrepôts, etc…
Également, le 2ème alinéa de l’article 315-1 du Code pénal prévoit « le maintien dans le local à la suite de l'introduction mentionnée au premier alinéa », sans précision de durée du maintien.
L’introduction frauduleuse et le maintien dans les lieux sont chacun punie de 2 ans d’emprisonnement et de 30.000 € d’amende.
Le deuxième délit défini à l’article 315-2 du Code pénal punit le fait de se maintenir « sans droit ni titre dans le local à usage d’habitation en violation d’une décision de justice définitive et exécutoire ayant donné lieu à un commandement régulier de quitter les lieux depuis plus de 2 mois. »
Ce deuxième délit concerne donc à la fois les squatteurs et les locataires, les deux se maintenant dans les lieux après obtention d’une décision de justice prononçant leur expulsion.
Il est bien évidemment prévu les exceptions dans les cas où :
- le Juge aurait accordé des délais pour quitter les lieux (L. 412-3 du code des procédures civiles d’exécution)
- il s’agit de la période hivernale (article L. 412-6 du même code)
- « lorsque le logement appartient à un bailleur social ou à une personne morale de droit public ».
Le maintien irrégulier dans les lieux est également puni d’une peine de 2 ans d’emprisonnement et d’une amende de 7.500 € qui viendront s’ajouter à l’indemnité mensuelle d’occupation jusqu’à la libération effective des lieux voire à une condamnation sous astreinte à quitter les lieux.
La Loi « Kasbarian » est venue aggraver des sanctions pour des délits déjà prévus dans le Code Pénal au Chapitre VI « des atteintes à la vie privée et à la personnalité » :
L’article 226-4 du Code Pénal institué par la Loi n°2015-714 du 24 juin 2015 sanctionne le fait de s’introduire « dans le domicile d'autrui à l'aide de manœuvres, menaces, voies de fait ou contrainte ».
La sanction est passée d’1 an d’emprisonnement et 15.000 € d’amende à 3 ans d'emprisonnement et 45.000 € d'amende.
Le maintien dans le domicile d'autrui à la suite de l'introduction mentionnée au premier alinéa, est puni des mêmes peines.
La notion de « domicile d’une personne » est défini par cet article comme « tout local d'habitation contenant des biens meubles lui appartenant, que cette personne y habite ou non et qu'il s'agisse de sa résidence principale ou non ».
L’article 313-6-1 du Code Pénal institué par la Loi n°2003-239 du 18 mars 2003 sanctionne le fait de « de mettre à disposition d'un tiers, en vue qu'il y établisse son habitation moyennant le versement d'une contribution ou la fourniture de tout avantage en nature, un bien immobilier appartenant à autrui, sans être en mesure de justifier de l'autorisation du propriétaire ou de celle du titulaire du droit d'usage de ce bien ».
La sanction est passée d'1 an d'emprisonnement et de 15.000 € d'amende à 3 ans d’emprisonnement et 45.000 € d’amende.
Ces sanctions tant pénales que financières importantes ont pour objectif de dissuader les squatteurs, les complices de ces derniers et les locataires défaillants dans le respect de la loi.
La loi Anti Squat : une procédure accélérée en cas de loyers impayés
contre le « locataire défaillant »
Diverses mesures ont été édictées pour la loi « Kasbarian » pour réduire les délais en matière de loyers impayés.
La stipulation obligatoire d’une clause résolutoire dans tout contrat de location.
Initialement, l’article 24 de la Loi du 6 juillet 1989 prévoyait seulement la possibilité de stipuler une clause résolutoire dans le bail.
Si le contrat de bail contenait une clause résolutoire, celle-ci produisait pleinement ses effets par la délivrance d’un commandement de payer visant la clause résolutoire resté infructueux dans le délai de 2 mois et le juge n’avait qu’à constater l’acquisition de cette clause au profit du bailleur et en tirer les conséquences en condamnant le locataire défaillant aux loyers impayés et en ordonnant son expulsion.
Si le contrat de bail ne contenait pas de clause résolutoire, le bailleur devait demander au juge qu’il ordonne la résiliation judiciaire du bail pour non-respect de ses obligations locatives par le locataire.
Désormais, l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989 est ainsi libellé : « tout contrat de bail d’habitation contient une clause résolutoire prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement ».
La réduction des délais de la procédure en acquisition de clause résolutoire : de 2 mois à 6 semaines (sauf pour les bailleurs personnes morales)
Avant, il fallait attendre 2 mois après la délivrance d’un commandement de payer visant la clause résolutoire pour pouvoir saisir le juge judiciaire d’une demande de résolution du contrat et d’expulsion du locataire : ce délai permettait au locataire de régler sa dette locative ou de la contester en saisissant lui-même le tribunal mais aussi avait pour conséquence d’aggraver la dette locative en cas d’absence de tout règlement.
Aujourd’hui, le délai a été réduit à 6 semaines.
En revanche, si le bailleur est une personne morale autre qu’une SCI familiale, le délai pour saisir le tribunal reste de 2 mois à compter de la date de saisine de la CCAPEX.
L’assignation, une fois signifiée au locataire, doit être notifiée par le commissaire de justice à la Préfecture au moins 6 semaines avant la 1ère audience.
Si cette réduction est certes appréciée, encore faut-il qu’elle soit suivie par la réduction de la durée de la procédure judiciaire qui peut durer parfois jusqu’à un an et demi ce qui là encore peut aggraver la dette locative.
Des délais de paiement réduits et soumis à condition.
Devant le juge, le locataire défaillant pouvait solliciter des délais pour régler sa dette locative pouvant aller jusqu’à 3 ans.
Depuis le 29 juillet 2023, de tels délais ne pourront être accordés par le juge qu’à la double condition cumulative que « le locataire soit en situation de régler sa dette locative et qu’il ait repris le versement intégral du loyer courant avant la date de l’audience ».
Aujourd’hui, si le locataire n’a pas repris le paiement de son loyer courant, sa demande de délais sera rejetée par le juge.
Des délais pour quitter les lieux réduits.
# Quand une décision de justice condamnait l’occupant sans droit ni titre à payer sa dette locative ainsi qu’une indemnité mensuelle d’occupation jusqu’à son départ effectif et ordonnait son expulsion, ce dernier pouvait solliciter des délais pour quitter les lieux devant le juge de l’exécution, en application de l’article 412-4 du Code des procédures civiles d’exécution, pouvant aller de 3 mois à 3 ans.
Le juge devait tenir compte « de la bonne ou mauvaise volonté manifestée par l’occupant dans l’exécution de ses obligations, des situations respectives du propriétaire et de l’occupant, notamment en ce qui concerne l’âge, l’état de santé, la qualité de sinistré par faits de guerre, la situation de famille ou de fortune de chacun d’eux, les circonstances atmosphériques, ainsi que des diligences que l’occupant justifie avoir faites en vue de son relogement ».
# Dorénavant, l’article 412-4 du Code des procédures civiles d’exécution prévoit désormais que les délais pour quitter les lieux ne peuvent être inférieurs à 1 mois ni supérieurs à 1 an.
Un 4ème alinéa a été ajouté à l’article 412-3 du même code précisant que « les deux premiers alinéas du présent article ne s'appliquent pas lorsque les occupants dont l'expulsion a été ordonnée sont entrés dans les locaux à l'aide de manœuvres, de menaces, de voies de fait ou de contrainte ».
La loi Anti Squat et son application dans le temps
L’article 2 du Code civil énonce que : « La loi ne dispose que pour l’avenir ; elle n’a point d’effet rétroactif ».
En matière contractuelle, la loi nouvelle s’applique pleinement aux contrats conclus postérieurement à son entrée en vigueur.
# S’agissant des contrats en cours au jour de l’entrée en vigueur de la loi, la survenance d’une règle nouvelle au cours de leur exécution vient perturber la stabilité des situations déjà établies de sorte que l’effet immédiat cède le pas à la survie de la loi ancienne.
Toutefois, ce principe dit de « survie de la loi ancienne » en matière contractuelle connaît lui-même des exceptions parmi lesquelles, les effets légaux du contrat et l’ordre public.
Concernant les effets légaux des contrats, la Cour de Cassation juge de manière constante que « la loi nouvelle régit immédiatement les effets des situations juridiques ayant pris naissance avant son entrée en vigueur et non définitivement réalisées » (Cass. 3ème Civ. 8 février 1989 n° 87-18.046, Cass. 3ème Civ. 15 mars 1989 n°87-19.942, Cass. 3ème Civ. 13 décembre 1989 n° 88-11.056).
Également, concernant l’application immédiate des précédentes lois en matière locative :
CA PARIS, Pôle 4, chambre 3, 26 Juin 2020 (n° 18/03540) : application immédiate de la réduction de la prescription de cinq à trois ans, pour « toutes actions dérivant d’un contrat de bail » (article 7-1 de la loi Alur du 24 mars 2014) alors même que cette disposition n’était pas énumérée comme immédiatement applicable par l’article 14 de la loi, qui fixait le dispositif transitoire de la loi nouvelle.
Cass. 3e Civ. 17 Novembre 2016 (n° 15-24.552) : application immédiate de la majoration du dépôt de garantie à défaut de restitution par le bailleur dans les délais prévus (article 22 de la loi du 6 juillet 1989 modifié par la loi du 24 mars 2014) : « Mais attendu que, la loi nouvelle régissant immédiatement les effets légaux des situations juridiques ayant pris naissance avant son entrée en vigueur et non définitivement réalisées, il en résulte que la majoration prévue par l’article 22 de la loi du 6 juillet 1989 modifié par la loi du 24 mars 2014 s’applique à la demande de restitution formée après l’entrée en vigueur de cette dernière loi ; qu’ayant constaté que le bailleur était tenu de restituer le dépôt de garantie au plus tard le 17 décembre 2014, la juridiction de proximité en a déduit, à bon droit, qu’il était redevable à compter de cette date du solde du dépôt de garantie majoré ; ».
Cass., 3ème Civ. 23 novembre 2017 (16-20.475): application immédiate de l’obligation d’assortir le congé d’une offre de relogement pour les locataires âgés de plus de 65 ans (l’article 15 III de la loi du 6 juillet 1989 dans sa rédaction issue de la loi du 24 mars 2014) : « Mais attendu, d’une part, qu’ayant retenu à bon droit que, la loi nouvelle régissant les effets légaux des situations juridiques ayant pris naissance avant son entrée en vigueur et non définitivement réalisées, il en résultait que l’article 15, Ill, de la loi du 6 juillet 1989, dans sa rédaction issue de la loi du 24 mars 2014, était applicable et relevé que la locataire était âgée de 66 ans et disposait de ressources inférieures au plafond en vigueur pour l’attribution des logements locatifs conventionnés, la cour d’appel en a exactement déduit que le congé, qui n’avait pas été assorti d’une offre de relogement, devait être annulé ; ».
Pour la loi « Kasbarian », si le délai octroyant au locataire pour régler sa dette constitue un effet légal de l’existence de la clause lui octroyant un tel délai, stipulée au contrat de bail, les dispositions du nouvel article 24 du ° 89-462 du 6 juillet 1989 impartissant un délai de six semaines aux locataires pour régler la dette locative ou le dépôt de garantie à compter de la délivrance d’un commandement de payer seraient applicables au contrat en cours, sur le fondement de l’effet légal du contrat, le bail étant un contrat à exécution successive dont les effets qu’il emporte ne sont pas définitivement réalisés tant qu’il n’a pas été résilié.
Il existe une autre hypothèque dans laquelle la jurisprudence a retenu que la loi nouvelle pouvait s’appliquer aux contrats en cours : si elle « contient une disposition relevant d’un ordre public impérieux » ou « des considérations d’ordre public particulièrement impératives » (Cass. 1ère Civ., 4 décembre 2001, n°99-15.629, Cass. 1re Civ., 17 mars 1998, n° 96-12183) ; il s’agit de l’ordre public.
Or, la loi du 6 juillet 1989 dispose en son article 2 que les articles 1 à 25 de la loi sont d’ordre public, s’agissant d’un ordre public de protection au profit du locataire.
Dès lors, la loi du 27 juillet 2023 modifiant l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989 pourrait également être considérée comme d’application immédiate sur le fondement de l’ordre public par le Juge.
Cependant, on pourrait penser que la loi n° 2023-668 du 27 juillet 2023 ne devrait pas s’appliquer immédiatement aux contrats en cours puisque le nouveau délai de six semaines, imparti au locataire pour régler sa dette, au lieu et place du délai de deux mois, n’est pas de nature à protéger les intérêts du locataire.
# Enfin la Cour de cassation avait par ailleurs jugé par le passé que l’ordre public de protection jouait tant en faveur du locataire que du bailleur (Cass. 3ème Civ. 3, 2 juin 1999, n°97-17.373).
En conséquence, la question sera forcément tranchée par la Cour de Cassation car en l’état, la loi du 6 juillet 1989 a pour effet de créer une cohabitation forcée entre deux droits fondamentalement opposés : le droit au logement (protection du locataire) et le droit de propriété (protection du bailleur), étant précisé que le Conseil Constitutionnel a jugé, aux termes de la décision n° 2023-853 DC du 26 juillet 2023, que l’objectif du délai de six semaines était de protéger le droit de propriété, inscrit dans la Constitution.
Seul bémol : le propriétaire d’un bien squatté n’est pas exonéré de son obligation d’entretien
et reste responsable en cas de dommage subi par l’occupant
On se souvient de l’arrêt rendu par la Cour de Cassation le 15 septembre 2022 (n°19-26.249) qui avait confirmé l’arrêt de la Cour d’Appel de PARIS du 10 septembre 2019 (n° 18/01892) condamnant un propriétaire à indemniser son ancien locataire qui s’était maintenu dans les lieux après qu’une décision prononçant son expulsion ait été rendue à son encontre.
L’ancien locataire avait fait une chute en raison du défaut d’entretien du garde-corps qui s’était décroché.
La Cour de Cassation avait considéré que « l’occupation sans droit ni titre d’un bien immobilier par la victime ne peut constituer une faute de nature à exonérer le propriétaire du bâtiment au titre de sa responsabilité, lorsqu’il est établi que l’accident subi par cette dernière résulte d’un défaut d’entretien de l’immeuble » visant expressément la responsabilité du fait des choses (article 1386 du Code Civil devenu 1244 du code civil).
La loi « KASBARIAN » avait prévu un article 7 exonérant un propriétaire d’un bien squatté de son obligation d’entretien et le libérant de toute responsabilité en cas de dommage.
Le Conseil Constitutionnel a censuré cet article considérant qu’il s’agit là d’une « atteinte disproportionnée au droit des victimes d’obtenir réparation du préjudice résultant du défaut d’entretien d’un bâtiment en ruine ».
En conséquence, l’article 1244 du Code Civil est toujours applicable et fait peser sur le propriétaire de logement squatté une lourde responsabilité en cas de dommages du fait d’un bâtiment non entretenu.
En revanche, rien n’interdit au législateur d’aménager une répartition des responsabilités entre le propriétaire et l’occupant illicite.