Il résulte de l’article L.1226-2-1 du code du travail dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, que lorsque l’avis d’inaptitude mentionne expressément que l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l’emploi, l’employeur est dispensé de rechercher et de proposer aux salariés des postes de reclassement.
Poursuivant son travail d’uniformisation et de contrôle, la Cour de cassation précise à nouveau les contours de la dispense d’obligation de reclassement prévue par la loi (Cassation sociale, 12 juin 2024, n° 23-13.552).
Les faits étaient les suivants :
Un ouvrier spécialisé engagé, le 10 septembre 1979, par la société Manufacture française des pneumatiques Michelin est déclaré inapte par le médecin du travail, le 6 juin 2017. Le médecin du travail précise, dans son avis que « l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l’emploi ». Le salarié est licencié le 25 octobre 2017.
Estimant que son employeur n’avait pas respecté son obligation préalable de reclassement, le salarié a saisi la juridiction prud’homale pour contester le caractère réel et sérieux de son licenciement.
Il obtient gain de cause devant la Cour d’appel considérant que l’avis du médecin du travail ne vise que l’impossibilité de reclassement dans son emploi et non pas dans tout emploi.
Dans le prolongement du pourvoi de l’employeur, la Cour de cassation censure la décision de la cour d’appel au motif que l’avis d’inaptitude mentionnait expressément que l’état de santé du salarié faisait obstacle à tout reclassement dans l’emploi, ce dont il résultait que l’employeur était dispensé de rechercher et de proposer des postes de reclassement.
Le licenciement reposait donc sur une cause réelle et sérieuse.
Notons que la Haute juridiction avait déjà adoptée la même solution lorsque l’inaptitude du salarié était d’origine professionnelle (Cassation sociale, 8 février 2023, n° 21-19.232).
Attention cependant : le raisonnement relatif à la dispense d’obligation de reclassement par l’employeur doit être nuancé lorsque l’avis d’inaptitude précise que l’état du salarié fait obstacle « sur le site » à tout reclassement dans un emploi.
Dans cette hypothèse, la Cour de cassation a pu considérer que l’employeur n’était pas dispensé de rechercher un reclassement hors de l’établissement auquel le salarié était affecté (Cassation sociale, 13 décembre 2023, n°22-19.603).
La prudence commande donc de lire attentivement l’avis du médecin du travail dans l’ensemble de ses composantes.
Nicolas PERRAULT
Avocat Associé