Evolution de jurisprudence importante consacrée par la cour de cassation en assemblée plénière.
Les faits et la procédure etaient les suivants : les parents d'un mineur avaient divorcés et la justice avait fixé la résidence habituelle de l'enfant chez la mère.
Apres avoir mis le feu à plusieurs espaces boisés, le mineur a été pénalement condamné par un tribunal judiciaire en première instance. Cette même juridiction a déclaré ses deux parents civilement responsables des dommages causés par les incendies.
Le père a fait appel. La cour d'appel lui a donné raison : elle a jugé que seule la mère pouvait être déclarée civilement responsable car c'est chez elle que la résidence habituelle du mineur avait été fixée.
La jurisprudence était en effet telle que la responsabilité civile des parents était engagée seulement avec la réunion de deux critères : les parents devaient avoir l'autorité parentale et l'enfant mineur devait habiter effectivement chez ses parents. La jurisprudence déduisait ainsi de la fixation de la résidence de l'enfant chez un de ses parents sa responsabilité civile pour réparer les dommages causes par le mineur.
Ainsi seul le parent chez lequel la résidence habituelle de l'enfant avait été fixée pouvait voir sa responsabilité civile engagée du fait des dommages causés par le mineur.
En dépit de cette jurisprudence, la mère a formé un pourvoi en cassation.
Par un arrêt de principe pris en assemblée générale et publié au bulletin la cour de cassation a fait évoluer sa jurisprudence et l'interprétation de l'article 1242, alinéa 4 du Code civil.
Elle a ainsi décidé que les deux critères prévus dans cet article pour déclencher la responsabilité civile des parents, à savoir l'exercice de l'autorité parentale et la cohabitation avec l'enfant, étaient consubstantiels. Cela signifie désormais que le fait que l'autorité parentale soit conjointe implique nécessairement que le mineur cohabite avec ses parents au sens de l'article 1242 du Code civil.
De façon un peu contre-intuitive, lorsque les parents exercent donc l'autorité parentale, la condition de cohabitation est donc considérée comme remplie pour les deux parents, même lorsqu'ils sont séparés et que l'enfant ne réside pas effectivement chez l'un d'eux.
La cour précise que ces deux critères consubstantiels que sont l'exercice conjoint de l'autorité parentale et la cohabitation ne connaissent qu'une exception : celle dans laquelle une décision administrative ou judiciaire confie l'enfant a un tiers. Si l'enfant réside habituellement chez un tiers, la responsabilité des parents, même s'ils exercent encore l'autorité parentale, ne pourra pas être engagée.
Camille VINCENT
Avocat, Barreau de Paris