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Abus de droit d’agir de l’appelant : le juge du fond doit caractériser la faute de l’appelant (Civ1. 7 février 2024, n°22-13.174)

Par un arrêt du 7 février 2024, la première chambre civile de la cour de cassation a fait une application stricte de la notion d’abus du droit d’agir en appel, régit par l’article 559 du Code de procédure civile, sur lequel il convient de revenir.

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Dans l’affaire en cause, du mariage d’un homme et d’une femme était née un enfant.

Par jugement du 4 septembre 2007, le divorce des époux avait été prononcé et une contribution mensuelle à l’entretien et à l’éducation de l’enfant de 1.500 euros avait été mise à la charge du père.

Par acte du 7 septembre 2016, le père a de nouveau saisi le Juge aux affaires familiales pour voir modifier les modalités d’exercice de l’autorité parentale et statuer sur la contribution à l’entretien et l’éducation de l’enfant.

En premier ressort, le Tribunal judiciaire a statué par une décision exécutoire de droit à titre provisoire, car rendu en matière alimentaire. Cette décision n’a manifestement pas convenu au père, lequel s’est par la suite : (1) abstenu de régler la part contributive à laquelle il avait été condamné, et (2) interjeté appel de cette décision.

En appel, la Cour a condamné le père à verser à la mère de l’enfant la somme de 5.000 € à titre de dommages et intérêts pour exercice abusif des voies de recours, retenant que l’appelant avait commis un fait fautif en n’exécutant pas le jugement de première instance, alors que « la légitimité d’une contribution à l’entretien et à l’éducation était incontestable » et que le jugement de première instance était « exécutoire de droit à titre provisoire ».

Pour la cour d’appel, ce fait fautif engageait la responsabilité de son auteur sur le fondement des articles 559 du Code de procédure civile et 1240 du Code civil, lequel devait donc réparer le « préjudice psychologique lié au stress d’une nouvelle procédure » subi par la mère.

Un pourvoi en cassation a donc été formé par le père.

La cour de cassation a cassé cet arrêt, considérant que la Cour d’appel s’est fondée sur « des motifs impropres à caractériser une faute ayant fait dégénérer en abus de droit de faire appel » et par conséquent, « a violé » l’article 1240 du Code civil.

La Cour de cassation fait ici une application classique des articles en cause : l’absence d’exécution d’un jugement de première instance, si fautif soit-il, ne rend pas fautif le fait de former appel à l’encontre de ce même jugement.

Ainsi, si le droit de faire appel peut dégénérer en abus, encore faut il caractériser une faute, condition de l’engagement de la responsabilité de l’appelant sur le fondement de la responsabilité délictuelle. C’est donc ce que rappelle la Cour de cassation dans son arrêt du 7 février 2024 (22-13.174).

A l’inverse, la faute dans le fait de former appel de façon abusive avait notamment été caractérisée par la cour de cassation dans le cas où la cour d’appel avait relevé un « but malicieux » de s’immiscer dans la vie de son ancienne concubine ainsi qu’un caractère abusif de la procédure joint à l’intention de vindicte qui la sous-tendait (Civ. 1re 3 mars 2009, RJPF 10/2009. 31), ce qui laisse donc un recours aux victimes de créanciers d’aliments peu scrupuleux et malintentionnés.

 

Camille VINCENT

Avocat Collaborateur

CategoryFamille
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