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FAMILLE – PAS DE CONTRIBUTION AUX CHARGES DU MARIAGE PAR APPORT DE FONDS POUR LA CONSTRUCTION D’UN BIEN A USAGE FAMILIAL

Cour de cassation, 1ère Chambre civile, 9 juin 2022, n°20-21.277 :

Deux époux mariés sous le régime de la séparation de biens divorcent en 2013. Les difficultés apparaissent dans le cadre de la liquidation de leurs intérêts patrimoniaux.

Une dualité classique s’installe : L’époux se prétendait créancier en raison de l’acquisition indivise d’un appartement ayant constitué le domicile conjugal. Son apport en capital provenait en effet d’un compte courant d’associé qu’il détenait personnellement. D’autre part, il sollicitait le remboursement au titre du financement, par apport de fonds personnels, des travaux d’édification d’une maison indivise qui avait à son tour servi de logement familial.

De son côté, l’épouse invoquait la contribution aux charges du mariage, ainsi que la clause stipulée dans le contrat de mariage prévoyant que chacun sera réputé avoir fourni au jour le jour sa part contributive, en sorte qu’ils ne seront assujettis à aucun compte entre eux.

De manière surprenante, la Cour d’appel de CHAMBERY, dans un arrêt du 1er septembre 2020, donne raison à l’épouse. Les jupes d’appel ont alors fait une application stricte du contrat de mariage et relevaient ainsi que l’importante disparité de revenus devait conduire le demandeur à contribuer de façon plus importante aux charges du mariage.

C’est dans ces circonstances que la Cour de cassation était de nouveau interrogée sur le périmètre de la contribution aux charges du mariage. Une dichotomie devait cependant être faite, entre le financement de l’acquisition du bien indivis constituant le domicile conjugal et, d’autre part, l’amélioration du bien indivis.

S’agissant en premier lieu de l’acquisition, c’est à nouveau sans surprise que la Cour de cassation a confirmé sa jurisprudence aujourd’hui bien établie, à savoir l’exclusion des charges du mariage de l’apport en capital pour l’acquisition d’un bien affecté à l’usage familial. Cette décision est prise au visa de l’article 214 du Code civil, la Haute juridiction se contentant de reprendre un attendu de principe mainte fois usité : « sauf convention contraire des époux, l’apport en capital de fonds personnels, effectué par un époux séparé de biens pour financer la part de l’autre lors de l’acquisition d’un bien indivis affecté à l’usage familial, ne participe pas de l’exécution de son obligation de contribuer aux charges du mariage. »

En second lieu, et en ce qui concerne la question de l’amélioration du bien indivis, la Haute juridiction a tout simplement adapté son attendu de principe en visant cette fois spécifiquement « l’amélioration, par voie de construction ».

Par ce jeu de miroir, la Cour de cassation étend sa jurisprudence de principe au cas de l’apport en capital pour la construction, sur un terrain indivis, d’un bien affecté à l’usage familial.

Ainsi, pour l’acquisition comme pour l’amélioration par voie de construction d’un bien indivis affecté à l’usage familial, l’apport en capital de fonds personnels effectué par un époux séparé de biens ne participe pas de l’exécution de son obligation de contribuer aux charges du mariage, sauf convention contraire entre époux.

Par cette décision, la Cour de cassation saisit l’occasion de réaffirmer sa jurisprudence initiée en 2019. (Cass.1re civ.n°18-20.828). L’élément nouveau est qu’elle applique ce même raisonnement à « l’amélioration par voie de construction » d’un bien indivis.

On ne saurait néanmoins lui reprocher, cette dernière ayant privilégié la simplicité qui est appréciable dans le cadre des opérations de liquidation des intérêts patrimoniaux.

Un intérêt qui vient à nouveau restreindre le périmètre de la contribution aux charges du mariage en matière de régime séparatiste, à tel point que l’on peut se demander jusqu’où ira cette extension jurisprudentielle ? Dans sa présente décision, la Cour de cassation se limite aux améliorations « par voie de construction » mais les nombreux cas d’espèces nous invitent à nous poser la question quant aux autres dépenses d’amélioration d’un bien à usage familial ou encore quant aux dépenses de conservation et d’entretien.

Des nombreuses décisions à venir donc, et qui viendront peut-être affaiblir à nouveau le principe de la contribution aux charges du mariage.

 Agathe DIOT-DUDREUILH

Avocat Collaborateur

CategoryFamille
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