PÉNAL – LE HARCELEMENT MORAL CONJUGAL
Le harcèlement moral est une forme de violence conjugale sanctionné par la loi depuis 2010.
Rappelons que les homicides au sein du couple représentent 20% de la totalité des homicides en moyenne, et que les chiffres sont alarmants en matière de suicide de femmes liés au harcèlement moral du conjoint.
En exploitant les données de la police et de la gendarmerie depuis 2016, l’étude permet de révéler que 800 femmes ont été tuées entre 2016 et 2018. Parmi elles, l’écrasante majorité (66 %) ont été victimes de meurtres et 15 % d’assassinats. Aussi, 11 % ont été victimes de violences ayant entraîné la mort sans intention de la donner. Enfin, 4 % ont subi un empoisonnement.
Sans surprise, le foyer représente l’endroit le plus dangereux pour les femmes puisque 74 % des femmes ont été tuées dans un lieu d’habitation. Dans le cas où la personne suspectée est le conjoint, l’homicide a eu lieu au sein même du foyer dans 83 % des cas.
Enfin, les femmes de 30 à 59 ans sont les principales victimes de leur conjoint.
La Loi du 9 juillet 2010 constitue donc le premier acte d’une prise en compte par les pouvoirs publics de la question de la violence psychologique au sein du couple.
Ainsi, celles et ceux qui sont insultés, humiliés, rabaissés au quotidien peuvent dorénavant porter plainte et espérer voir l’auteur de ces comportements réprimé pénalement.
- L’article 222-33-2-1 du Code pénal dispose que :
« Le fait de harceler son conjoint, son partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou son concubin par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de vie se traduisant par une altération de sa santé physique ou mentale est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende lorsque ces faits ont causé une incapacité totale de travail inférieure ou égale à huit jours ou n’ont entraîné aucune incapacité de travail et de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 € d’amende lorsqu’ils ont causé une incapacité totale de travail supérieure à huit jours. »
L’article 9 du 30 juillet 2020 est venue compléter ce dispositif en sanctionnant le harcèlement du conjoint lorsque celui-ci conduit la victime au suicide dès lors que l’article 222-33-2-1 du Code pénal a été renforcé par un nouvel alinéa qui dispose que les peines sont portées à dix ans d’emprisonnement et à 150 000 € d’amende lorsque le harcèlement a conduit la victime à se suicider ou à tenter de se suicider.
En droit, l’article 222-33-2-2 du code pénal exige que les comportements dénoncés ou les propos répréhensibles de l’auteur aient eu pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de vie de la victime se traduisant par une altération de sa santé physique ou mentale.
La Cour de cassation, dans un arrêt rendu le 14 janvier 2014 rappelle que « La simple possibilité d’une telle dégradation suffit à consommer le délit de harcèlement moral » (cass, crim, 14 janvier 2014, n°11 – 81.362).
Infraction d’habitude, la jurisprudence précise que cette disposition se matérialise par l’existence de « propos ou comportements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de vie ».
Dès lors, si le texte ne précise pas quels sont les comportements et les propos qui ont pour objet ou pour effet de dégrader les conditions de vie d’une personne, il impose en revanche qu’ils soient réitérés sur une période plus ou moins courte.
Plus précisément, l’analyse de la jurisprudence permet de comprendre ce qu’il convient d’entendre par le terme de « Comportements répétés ». A cet égard, la Cour de cassation est très claire puisqu’elle exige la nécessité de rapporter la preuve d’un acharnement.
Ainsi, la production de mails intempestifs ou de sms successifs s’étalant sur une longue période est requise pour caractériser la matérialité de cette infraction (cass, ch.crim, 9 mai 2018, n°17-83.623).
Par ailleurs, si ce délit n’exige pas que les agissements répétés soient de nature différente, encore faut-il que les juges caractérisent « la répétition et la systématisation d’attitudes, de paroles, de comportements qui pris, séparément peuvent paraitre anodins, mais qui à la longue, sous l’effet de la réitération deviennent punissables » (cass, crim, 26 janvier 2016, n°14 – 80.455).
Cette répétition doit avoir pour effet « une dégradation des conditions de vie du compagnon ou du conjoint ». En cela, il est donc nécessaire de rapporter la preuve de son préjudice moral ou physique, celui-ci pouvant être rapporté par un certificat médical.
Enfin, la dégradation des conditions de vie s’entend comme « Se traduisant par une altération de sa santé physique ou mentale ». Pour le législateur, il faut que la dégradation des conditions de vie soit concrètement prouvée.
Enfin, si ce délit n’exige pas que les agissements répétés soient de nature différente, faut-il encore que les juges caractérisent « la répétition et la systématisation d’attitudes, de paroles, de comportements qui pris, séparément peuvent paraitre anodins, mais qui à la longue, sous l’effet de la réitération deviennent punissables » (cass, crim, 26 janvier 2016, n°14 – 80.455).
Véronique SALICETI
Avocat Collaborateur
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