FAMILLE – CE QUE CHANGE LE REGLEMENT BRUXELLES II TER EN MATIERE DE RESPONSABILITE PARENTALE
Depuis le 1er août 2022, le règlement (UE) 2019/1111 du 29 juin 2019 relatif à la compétence, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière matrimoniale et en matière de responsabilité parentale et à l’enlèvement international d’enfants (communément appelé « Règlement Bruxelles II ter ») est devenu pleinement applicable. Il remplace ainsi le règlement Bruxelles II bis.
Pour rappel, ce règlement s’applique aux affaires civiles concernant :
- la désunion des époux (divorce, séparation de corps et annulation du mariage) ainsi que,
- la responsabilité parentale (autorité parentale, administration légale ou tutelle des mineurs).
Sont notamment exclues du champ d’application du Règlement Bruxelles II ter les obligations alimentaires, et les régimes matrimoniaux.
Il sera ici question de la progression de l’autonomie de la volonté en matière de responsabilité parentale.
En effet, le nouvel article 10 du Règlement Bruxelles II ter permet à la fois (1) une prorogation de compétence ; ainsi qu’un (2) choix de juridiction.
(1) Prorogation de compétence
Le principe est celui de l’acceptation par une partie de la compétence d’une juridiction d’un Etat membre avec lequel l’enfant, qui est au cœur de la procédure, a « un lien étroit », et en particulier : la résidence habituelle d’un des titulaires de la responsabilité parentale ; l’ancien résidence habituelle de l’enfant ou la nationalité de cet état membre (article 1. a du Règlement Bruxelles II ter).
Le Règlement Bruxelles II ter reprend les dispositions de l’article 10 du Règlement Bruxelles II bis en matière de prorogation de compétence, en y ajoutant deux subtilités.
La première, tient au fait qu’avec la précédente version du Règlement Bruxelles II, la prorogation ne pouvait être faite qu’au moment de la saisine de la juridiction. Désormais avec l’article 10.1.b) ii), les parties peuvent également accepter la compétence d’une juridiction en cours de procédure.
La seconde subtilité apportée en matière de prorogation de compétence est celle de l’information des parties de la possibilité qu’elles ont de ne pas accepter la prorogation de compétence. Aussi, le juge doit-il vérifier que les parties – en l’occurrence le.a. défendeur.resse – a bien été informé.e de son droit de ne pas l’accepter la prorogation de compétence.
Une fois la compétence d’une juridiction saisie par une partie est acceptée par l’autre en cours de procédure, cette compétence devient exclusive, et aucun transfert de compétence ne peut plus être effectué.
(2) Choix de juridiction en amont
La disposition la plus innovante est celle relative à la convention d’élection de juridiction. Il s’agit d’une nette avancée vers l’autonomie de la volonté en matière parentale, les parents pouvant convenir, et prévoir, de la compétence d’une juridiction pour trancher d’un litige non encore né entre eux.
Cette clause d’élection de juridiction doit être convenue par écrit datée et signée, au plus tard au moment où la juridiction est saisie. En pratique une transmission par voie électronique est considérée comme une « forme écrite » (article 10.2. §1er du Règlement Bruxelles II ter).
Le considérant 23 du Règlement Bruxelles II ter dispose que la juridiction doit examiner si le choix fondé sur choix éclairé et sans contrainte. En pratique, il sera donc conseillé de convenir d’une telle clause d’élection de juridiction avec un Conseil assistant chaque partie, ce qui sera de nature à sécuriser l’obligation d’information, et de consentement libre et éclairé requis.
Pour innovante qu’elle soit, cette nouvelle possibilité de choix préalable de juridiction a cependant ses limites. Il semblerait en effet que ce choix préalable de juridiction ne soit pas – contrairement à la prorogation de compétence de l’article 1. b).ii) – exclusive. Cela signifie que des parents qui concluent une telle convention de choix de juridiction en amont – par exemple d’une expatriation – ne seront pas nécessairement liés par le choix qu’ils auraient fait.
Cette absence d’exclusivité de juridiction en dépit du choix des parties serait alors de nature à porter atteinte à une prévisibilité juridictionnelle qui aurait été la bienvenue en matière de responsabilité parentale internationale.
Camille VINCENT
Avocat Collaborateur
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